Le périodique Alter’Echo n°478, paru fin novembre 2019, contient un article intitulé « Frais hospitaliers : ces enfants victimes de batailles administratives ». Ce titre a évidemment retenu toute mon attention et la lecture de l’article m’a fortement interpellé.
Il apparaît en effet que le Gouvernement de la Communauté française a décidé, en janvier 2019 par voie d’arrêté, que l’administration de l’Aide à la Jeunesse n’assumerait plus les frais relatifs à la prise en charge de jeunes en milieu hospitalier alors même que ces prises en charge étaient décidées par les services d’Aide à la jeunesse. Si l’on peut comprendre les raisons qui ont poussé votre prédécesseur à prendre cette décision – sans pour autant être d’accord mais c’est là un autre débat ! – (cohérence dans la répartition des compétences au sein de notre Etat fédéral, application « ferme » des principes de l’aide à la jeunesse qui se veut complémentaire et supplétive, ou encore économies sur des coûts considérés comme ne relevant pas de l’aide à la jeunesse), je ne peux être insensible à certaines critiques qui sont émises.
La première concerne la méthode, manifestement unilatérale, et semble-t-il sans concertation avec l’ensemble des opérateurs concernés, notamment sur les conséquences d’une telle évolution et les alternatives à envisager. On remarque par ailleurs que l’avis demandé au Conseil communautaire de l’aide à la jeunesse, a été demandé sans respect des délais prévus à cet effet. Il apparaît également que cet Arrêté n’est pas particulièrement clair dans ses intentions, mais qu’en réalité il a pour conséquence de mettre un terme net à une pratique qui s’était ancrée dans le paysage de l’aide sociale en Belgique francophone. A ce sujet, ce n’est pas ma manière d’envisager les relations entre pouvoirs publics et encore moins entre pouvoirs publics et opérateurs de terrains, quels qu’ils soient ! Je ne peux donc que m’étonner et m’insurger des propos relayés dans cet article.
La seconde, et c’est évidemment celle qui me préoccupe le plus, concerne les conséquences de cette décision sur les enfants et les jeunes concernés, mais également sur leur famille. Et donc globalement sur la réalisation des missions de l’aide à la jeunesse. Je ne pourrais en effet accepter qu’un telle décision unilatérale ait été prise sans anticiper ces conséquences éventuelles, uniquement en partant du principe que « ce sont avant tout les parents qui sont les premiers éducateurs de leur enfant ». Il s’agit ici d’une phrase reprise dans la note explicative de l’administration qui consiste en effet à considérer que c’est aux parents de payer, voire aux CPAS, et tant pis si les parents n’ont pas les moyens soit de payer, soit d’obtenir le soutien nécessaire de la part des services d’aide sociale générale ! Et qu’en est-il des situations où l’enfant ou le jeune est en décrochage familial complet ? Ou enfin, comment gérer une situation d’urgence de placement et des démarches longues d’obtention d’une aide sociale générale ? Concrètement, cela revient à créer de l’inégalité entre enfants et jeunes et donc à une sorte de double-peine intolérable. Et ces critiques sont émises notamment par des opérateurs de l’aide à la jeunesse !
Madame la Ministre, au sujet de ce dossier, je souhaiterais vous poser les questions suivantes :
– Avez-vous eu échos de ce dossier depuis votre prise de fonction ? Vos retours sont-ils les mêmes ou divergent-ils des témoignages relayés dans l’article de l’Alter’echo ? Existe-t-il des retours formels de la part des opérateurs de l’aide à la jeunesse, de la santé ou des CPAS ? Si oui, quels sont-ils ? Si non, envisagez-vous, à l’issue de cette question, de les concerter ?
– Une évaluation des impacts de cette décision a-t-elle été réalisée, notamment sur les conséquences sur les missions de l’aide à la jeunesse et les impacts sur les premiers concernés ? Si oui, pouvez-vous nous en exposer les grandes lignes ? Si pas, pouvez-vous envisager de la mener ?
Retrouvez mon intervention ainsi que la réponse de la ministre sur le site du Parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles.