Dans le dernier numéro du périodique Axelle, le numéro 240 de juin 2021, on peut lire un article intitulé « L’aide à la jeunesse, aveugle aux violences vécues par les mères? ». Un titre qui m’a interpellé, en tant que parlementaire en charge du suivi des matières de l’aide à la jeunesse pour mon groupe politique et qui a dû, je n’en ai aucun doute, vous interpeller également en tant que Ministre ayant l’aide à la jeunesse dans vos compétences.

Madame la Ministre, ce n’est pas la première fois que je vous interpelle sur cette question de la prise en compte des violences faites aux femmes dans le cadre des procédures d’aide et de protection de la jeunesse. Néanmoins, la multiplication des témoignages et ce nouvel article ne peuvent nous laisse de marbre face à ce qui semble se jouer dans ces secteurs. Dans l’article, trois constats sont faits.

Le premier concerne l’ampleur du problème. Ainsi, il apparaît que l’augmentation du nombre de femmes témoignant de conditions de collaborations ingrates, d’une lenteur dans la prise en charge et l’accompagnement ou d’un suivi lacunaire ne peut plus laisser croire à quelques dysfonctionnements ponctuels mais bien à des problèmes structurels.

Le second concerne le manque de crédit apporté à la parole des mamans, qui témoignent faire l’objet d’une stigmatisation importante et récurrente et porter des étiquettes désobligeantes tout au long de la procédure et orientant indéniablement les décisions prises. On parle ici des termes folle, hystérique ou manipulatrice, de même que ceux de fragiles, désinvesties ou en détresse. Parallèlement, il serait constaté un manque de considération à l’égard des expertises médicales allant dans le sens des mères. Alors même que certaines mamans ont pris l’initiative de contacter le SAJ pour solliciter une aide, elles se retrouvent accusées, doivent justifier de leur « réelles motivations » et le bon équilibre de leur santé mentale, ce qui ne fait que rajouter de la violence aux violences déjà vécues.

Enfin, le troisième constat est celui d’une méconnaissance du fonctionnement des violences intrafamiliales et particulièrement (post-)conjugales. Celles-ci apparaissent bien trop souvent amalgamées à un climat de tensions ou de disputes et sont ainsi minimisées, voire niées ou invisibilisées par les services de l’aide et de la protection de la jeunesse. Parallèlement, la préservation du lien avec le père, même si celui-ci est violent, est souvent privilégié avec toutes les conséquences que l’on peut imaginer sur les enfants et sur les mamans. A cet égard, la formation des professionnels aux violences (post-)conjugales et à ses fonctionnements est pointée comme urgente et prioritaire.

Madame la Ministre, le multiplication des témoignages sur l’absence de prise en compte des violences faites aux femmes ainsi que par le recours à des procédures encore largement empruntent de patriarcat par les services de l’aide à la jeunesse est particulièrement préoccupante. Voici donc mes questions à ce sujet :

  • Avez-vous pris connaissance de cet article et, dans l’affirmative, quelle est votre lecture et votre analyse de celui-ci ?

  • Avez-vous eu l’occasion de rencontrer ces femmes et ces associations qui leur permettent de témoigner et qui les soutiennent des les violences qu’elles subissent ? Quelles en ont été les conclusions ?

  • Lors d’un échange précédent, vous précisiez « en revanche, la problématique des violences intrafamiliales est bien au cœur des préoccupations des SAJ et des SPJ. Comme énoncé dans la Déclaration de politique communautaire (DPC), le gouvernement a l’ambition de «mener une politique efficace et coordonnée de lutte contre les violences à l’égard des femmes qui passe par des mesures urgentes en conformité avec les exigences de la Convention d’Istanbul en lien avec les recommandations du rapport alternatif de la société civile (…)ۛ». C’est pourquoi nous déployons actuellement un dispositif pour assurer la formation des professionnels de l’aide à la jeunesse aux violences à l’égard des femmes, au processus de domination conjugale et aux impacts que peuvent avoir ces violences sur les enfants. ». Pouvez-vous nous détailler le dispositif de formation auquel vous faisiez référence ? Quels sont les moyens déployés, dans quel calendrier ? Quels sont les modules de formation organisés et à destination de quels professionnels ? Par qui le sont-ils ? Si le dispositif a déjà été lancé, quel est le premier bilan qui peut être fait ?

  • Outre l’enjeu de la formation, il apparaît que les procédures mises en œuvre par les services sont questionnés, par rapport à leur qualité, mais également à l’égard du déséquilibre entre les mamans et les papas ou encore à l’égard des stigmatisations des mamans. A cet égard, pouvez-vous nous dire si un travail d’évaluation est en cours et nous préciser lequel ?

 

Retrouvez  ma question et la réponse de la ministre sur le site du Parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles.