En mars 2021, le Parlement francophone bruxellois a approuvé une série de recommandations rédigées après un riche travail d’auditions et de discussions qui se sont tenues en
commission des Affaires générales et de la Cohésion 
sociale du Parlement francophone bruxellois dans la foulée du Jeudi de l’Hémicycle consacré à la problématique des « jeunes en errance » tout au long de l’année 2020.

Qui sont ces « jeunes en errance », parfois également appelé « incasables » ?  Même s’il est admis qu’il est difficile de  donner une définition qui puisse englober l’ensemble des réalités que cette appellation recouvre, nous allons nous référer ici à celle que nous avait donnée Fanny Laurent, du Forum-Bruxelles contre les inégalités : « il s’agit des jeunes de moins de 26 ans en situation de sans-abrisme ou à risque de s’y retrouver. Cette définition permet de toucher tout jeune éprouvant des difficultés susceptibles de créer une « errance,, c’est-à-dire une instabilité sur différents aspects de sa vie dont le logement. Elle avait également ajouté : « L’attention au risque de sans-abrisme est importante car il est nécessaire de penser la thématique en termes de prévention. » Par ailleurs, si le nombre exact de jeunes concerné.e.s est toujours inconnu, le Forum-Bruxelles contre les inégalités dans le cadre de sa campagne #incasables, avait estimé qu’en Belgique francophone, il y avait plusieurs milliers de jeunes sans-abri ou à risque de le devenir.

Il est également important de souligner que les causes de l’errance peuvent être très diverses. En voici quelques exemples – ce ne sont pas les seuls : le genre, une grossesse, les minorités visibles, LGBTQI+, les barrières à l’intégration en tant que migrant ou en tant que mineur étranger non-accompagné (MENA), une difficulté scolaire ou un décrochage total,  un handicap ou une maladie chronique, le fait de subir des violences ou maltraitances physiques, psychiques, sexuelles, …. Si je les cite, c’est que la diversité des facteurs de vulnérabilité était pointée en 2021 par la coalition intersectorielle  « A Way Home » comme contribuant à rendre invisibles les jeunes en errance en termes de recueils de données scientifiques, ce qui mène à une relative absence d’actions politiques bruxelloises.

Enfin, le non-accès au logement est au coeur même de la problématique des jeunes en errance à Bruxelles, raison pour laquelle, sur les 47 recommandations votées à l’unanimité au PFB, 8 sont exclusivement consacrées à l’accès au logement :

  1. Concrétiser le soutien des pouvoirs publics à la mise en place de la coalition « A Way Home » visant à mettre en présence des opérateurs de terrain et des opérateurs publics et politiques de tous les niveaux sur un territoire donné, dans le but de trouver des solutions concrètes pour mettre fin au sans-abrisme des jeunes.

  2. Renforcement des dispositifs d’Aide à la jeunesse en matière d’hébergement d’urgence en région bruxelloise, en portant une attention spécifique à tous les publics, dont les jeunes femmes, les jeunes transgenres et/ou les jeunes à l’orientation sexuelle minoritaire. (…).

  3. Promouvoir et renforcer le soutien aux dispositifs de type « housing first » et aux opérateurs qui les mettent en œuvre.

  4. Renforcer les capacités d’actions et de coordination du monde associatif à l’égard du droit au logement :

    1. Renforcer les dispositifs associatifs (dont les Associations d’Insertion Par le Logement – AIPL) menant une action spécifique envers le public des jeunes en errance tels que les dispositifs dit « capteur de logement » ;

    2. Soutenir la création de dispositifs visant la remise au logement mis en œuvre par les associations qui accueillent et accompagnent les jeunes en errance, à l’image du « Kot Autonome Provisoire – KAP) porté par le Centre d’Education en Milieu Ouvert (CEMO).

  5. Diversifier et augmenter les dispositifs permettant aux jeunes de se loger en tenant compte de ses besoins spécifiques (du moins autonome au plus autonome par exemple), y compris en assurant que les besoins spécifiques et urgents des jeunes en errance puissent être pris en compte par les dispositifs publics permettant l’accès durable à un logement (via le système des dérogations dans le logement public, des collaborations avec des AIS ou d’autres opérateurs immobiliers publics).

  6. Œuvrer à l’individualisation des droits sociaux pour permettre notamment la vie en colocation ou créer des dispositifs d’habitats solidaires permettant de garantir le statut social d’isolé au sein d’un habitat collectif.

  7. Renforcer les dispositifs permettant le soutien des jeunes à leur installation via la constitution d’une garantie locative et/ou l’octroi de frais d’installation (via le Fonds du Logement, les CPAS ou tout autre dispositif existant ou à créer).

  8. Organiser un débat législatif autour de la loi permettant à un mineur de signer un bail en son propre nom.

Madame la Secrétaire d’Etat, j’aimerais faire le point sur la situation actuelle et sur la manière dont ces recommandations sont mises en oeuvre dans le cadre des politiques de logement en Région Bruxelles-Capitale :

  • Avez-vous pris connaissance des recommandations liées au logement pour  les jeunes en errance ? Si oui, quelle analyse en avez-vous fait ?
  • Suite à la publication de celles-ci, des contacts ont-ils été pris entre votre cabinet et/ou votre administration et des associations de terrain dédiées au suivi des jeunes en errance et/ou au droit au logement des jeunes ? Dans l’affirmative, quelle(s) association(s) avez-vous contactée(s) et/ou rencontrée(s) ? Quelles ont été les avancées suite à cette ou ces rencontre(s) ?
  • Quelle(s) action(s) concrète(s) découlant de ces recommandations ont-elles déjà été mises en place ? D’autres sont-elles déjà à ce stade programmées et, dans l’affirmative, lesquelles ?
  • Une des recommandations invite à « renforcer les dispositifs associatifs (dont les Associations d’Insertion Par le Logement – AIPL) menant une action spécifique envers le public  des « jeunes en errance » tels que les dispositifs dit « capteur de logement » ». Pouvez-vous me dire si une ou des AIPL mène(nt) une action spécifique envers le public  des « jeunes en errance ». Si oui, laquelle ou lesquelles ? Pouvez-vous me dire si son action a pu être renforcée suite au travail du Parlement francophone bruxellois ?
  • Avez-vous participé à des réunions de la coalition intersectorielle « A Way Home Brussels » dont le but est de mettre fin au sans-abrisme des jeunes et à répondre aux multiples besoins des jeunes en errance en Région de Bruxelles-Capital (RBC). Si oui, pouvez-vous nous détailler les échanges et quelles en sont les conclusions ?

Retrouvez mon intervention et la réponse de la Secrétaire d’État sur le site du Parlement