Il y a quelques temps, nous apprenions votre volonté de faire évoluer le Code de la prévention, de l’Aide à la jeunesse et de la protection de la Jeunesse par rapport à la durée des mesures prises. Il apparaît en effet que vous envisageriez de supprimer l’obligation de l’évaluation annuelle des mesures prises dans le cadre de procédures d’aide ou de protection de la jeunesse.

Cela est confirmé par l’avis n°35 du Conseil communautaire qui se trouve sur le site internet de l’Aide à la jeunesse en FWB et qui a été rédigé en réponse à une demande de votre cabinet du mois de mars 2023 visant à remettre un avis sur la pertinence du renouvellement annuel des mesures de protection prévu par l’article 43 §1er du décret du 18 janvier 2018.

Et les conclusions de cet avis sont sans appel : « Pour l’ensemble des ces raisons, le Conseil communautaire s’oppose fermement à l’allongement du délai de renouvellement des mesures au-délà d’un an et à la pondération de ce délai dans des situations spécifiques. Le Conseil au contraire affirme que ce délai d’un an est un maximum, qu’il convient de favoriser l’évaluation aussi régulière que possible de la mesure mise en place, et ce dans toutes les situations. »

Parmi les principales raisons et arguments mobilisés pour justifier cette conclusion, le Conseil estime, je cite, « inconcevable qu’il soit possible de remettre en question cette garantie de droit fondamental, qui constitue l’un des plus grandes avancées du décret de 1991 qui n’a pas été questionnée lors de l’évaluation du décret de 2018 instaurant le Code, sur la base d’une interprétation d’une partie de recommandation d’une seule étude universitaire portant sur « comment améliorer les relations entre les parents et leur enfants placés » alors même que les principaux intéressés n’ont pas été questionnés lors de cette étude, sans réflexion approfondie au sein du secteur et en à peine une ou deux séance du Conseil communautaire ».

Par ailleurs, le Conseil « affirme l’absolue nécessité de maintenir ce principe fondamental de droit – fondement de la philosophie de l’aide et la protection de la jeunesse – qu’est la limitation à 1 an maximum de toute mesure de placement ; et ce sans y ajouter la moindre nuance au sein de cet article qui induirait une temporalité différentiée liée à la situation familiale de l’enfant. » et rajoute que « les délais de révision de mesure à un an maximum sont des garanties fortes et à préserver que donne le législateur à toute personne dont les droits fondamentaux sont atteints, ici en l’occurrence un enfant/jeune en situation de vulnérabilité qu’il faut protéger. Ces garanties sont fondamentales et sont données d’ailleurs par le législateur en d’autres situations, par exemple lors maintien en observation/hospitalisation est envisagé pour les malades mentaux, personnes faibles qu’il faut également protéger particulièrement. ».

Enfin, le Conseil s’attache, dans son avis, à préciser les raisons de l’importance de ce droit (qui existe d’ailleurs dans d’autres situations), l’existence d’outils permettant de réduire le stress et rappelle les inquiétudes et recommandations que le Comité des droits de l’enfant a fait récemment à la Belgique.

Madame la Ministre, vous comprendrez que votre projet de modification du Code m’interpelle particulièrement et que je souhaite dès lors vous posez les questions suivantes à cet égard :

  • Cet avant-projet de décret est-il toujours existant malgré cet avis unanimement et fermement opposé du Conseil communautaire ? Le cas échéant, où en est-il dans le processus législatif ?

  • Pouvez-vous nous préciser les modifications envisagées dans le décret de 2018 instaurant le Code ? Celles-ci ont-elles évolué suite à l’avis n°35 du Conseil communautaire ?

  • Pouvez-vous nous détailler les raisons qui vous poussent à proposer cet avant-projet de décret ?

  • Avez-vous pris connaissance de l’avis n°35 du Conseil communautaire et que répondez-vous à cette instance ?

  • N’estimez-vous pas pertinent qu’une telle modification fasse l’objet d’un travail collectif plus large, impliquant l’ensemble des parties prenantes, dont les juges, les enfants/jeunes/familles,… ?

 

Retrouvez mon intervention ainsi que la réponse de la ministre sur le site du  Parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles.